Nathalie Vanara, Laurent Bruxelles, Philippe Audra, Stéphane Jaillet, Christophe Gauchon : Karst 2018 : plus qu’un anniversaire, plus qu’un hommage : un nouveau départ, 1-2
Edwige Pons-Branchu, Nicolas Durand, Yanni Gunnell, Marc Calvet, Magali Delmas, Patrick Sorriaux : Relations entre karst et glaciers depuis 450 ka dans les grottes de Niaux-Lombrives-Sabart (Pyrénées), 3-16
Résumé
Les grottes de Niaux (680 m), Lombrives (600 m) et Sabart (560 m) se développent sur 14 km dans le massif du Cap de la Lesse (1 189 m), au confluent de l’Ariège et du Vicdessos, au sud du bassin de Tarascon-sur-Ariège. Le massif est constitué de calcaires du Crétacé inférieur, karstifiés probablement dès le Tertiaire, puis plusieurs fois recouverts par les glaciers de l’Ariège et du Vicdessos au cours du Quaternaire. Dans les années 1980, l’analyse stratigraphique et sédimentologique des remplissages karstiques, ainsi que des datations U/Th dans des planchers stalagmitiques, avaient fourni un cadre chronostratigraphique pour les derniers 350 ka. Plus récemment, la cartographie et la datation des dépôts de marges glaciaires dans les vallées de l’Ariège et du Vicdessos (37 datations par le nucléide cosmogénique 10Be produit in situ) ont permis de fixer la chronologie des fluctuations glaciaires pléistocènes dans le bassin de Tarascon et aux abords du massif de Cap de la Lesse.
Ces données, ainsi qu’une série inédite de 27 datations U/Th obtenues dans la grotte de Niaux, permettent de préciser ici la chronologie des périodes de réactivation du karst en phase avec les fluctuations des paléo-englacements dans les vallées voisines.
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Kim Génuite, Jean-Jacques Delannoy, Stéphane Jaillet : Reconstitution des paléogéographies karstiques par l’approche cartographique 3D : Application au Pont d’Arc et à la Combe d’Arc (Ardèche, France), 17-24
Résumé
Le Pont d’Arc, porte d’entrée emblématique de l’amont des gorges de l’Ardèche, constitue un puissant marqueur du paysage qui attire un très grand nombre de touristes comme il pourrait avoir retenu l’attention des Hommes du Paléolithique supérieur qui ont fréquenté la toute proche grotte Chauvet. L’intérêt que l’homme porte au paysage est au cœur des travaux actuels sur l’évolution des géographies passées formant l’environnement de sites sacrés et ornés, mais si le Pont d’Arc attire aujourd’hui des visiteurs, avait-il forcément le même impact visuel au moment des fréquentations préhistoriques ? Comment reconstituer des paléogéographies de la combe et du Pont d’Arc qui ont varié au cours du Quaternaire, sous l’effet des processus géomorphologiques soumis aux variations climatiques ? Sur la base de relevés géomorphologiques, notamment des anciens niveaux alluviaux et d’indices karstogéniques, une reconstitution est ici proposée à l’aide des outils d’acquisition et de traitement de données 3D à haute résolution spatiale, et les premiers résultats issus du recalage topographique des tomographies électriques et de l’analyse pétrographique et granulométrique des terrasses alluviales sont abordées. L’impact des remblaiements alluviaux autour du Pont d’Arc sur les modelés de ce dernier et sur les dynamiques hydrologiques de la combe d’Arc sont discutées.
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Philippe Monteil : L’étagement des cavités du serre du Barri à Saint-Privat-de-Champclos (Gard), 25-30
Résumé
Le serre du Barri (Saint-Privat-de-Champclos, Gard) est un petit relief, point culminant de la rive gauche des gorges de la Cèze, à 4 km de leur entrée. Vestige de la surface d’aplanissement oligo-miocène du plateau calcaire urgonien de Méjannes-le-Clap, il est délimité au sud par les gorges de la Cèze et à l’ouest par celles du Malaygue-Roméjac. Après avoir décrit les réseaux spéléologiques étagés sur près de 180 m de dénivellation et commandés par une fracturation locale dense, nous mettons en corrélation l’étagement des réseaux avec les aplanissements et la présence d’alluvions anciennes, témoins des variations de niveau de base depuis le Miocène.
Enfin, nous essayons de mettre aussi en relation la spéléogenèse du serre du Barri avec la dynamique de creusement liée à la zone de confluence et aux paléo-pertes de ses affluents.
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Luis A. Borrero, Fabiana Martin, Carole Nehme, Joël Rodet, Dominique Todisco : Les cavités du Cerro Benitez (Patagonie, Chili) Hypothèses génétiques glacio-karstiques, 31-42
Résumé
L’étude du Cerro Benitez en Patagonie chilienne (Última Esperanza) offre l’opportunité de documenter une modalité de karstogenèse spécifique sur les marges andines, entre les secteurs hyperhumides à l’ouest et secs à l’est des Andes.
Cette karstogenèse est liée à la dynamique de la calotte patagonienne durant le dernier maximum glaciaire (ca 40-17,5 ka cal. BP) avec les avancées glaciaires et les fluctuations du lobe de piedmont Última Esperanza. Cette dynamique glaciaire a fortement impacté le Cerro Benitez donnant lieu à une évolution régionale en contexte lacustre proglaciaire à la fin du Pléistocène.
L’évolution glacio-lacustre ne semble pas avoir été suffisamment morphogène et durable pour induire la formation des cavités observées. Une genèse glaciokarstique antérieure à l’évolution glaciolacustre régionale fini-pléistocène semble être plus probable, ce que suggèrent les
morphologies souterraines (mono-galeries rectilignes à faible déclivité) et les formes de surface sculptées observées. Les cavités étudiées ne présentent ni de connexion directe avec la surface, ni de signatures morphologiques pouvant être assimilées à des écoulements en système phréatique ou vadose suivant un gradient hydraulique marqué. L’absence d’organisation hydrodynamique d’écoulement par drain, de tout système introductif et de formes de restitution hydrique, vers un paléo-niveau de base extérieur, permet de considérer les cavités du Cerro Benitez non comme de réels collecteurs souterrains, mais plutôt comme des formes de dégagement inter-bancs par des processus érosifs exogènes. Dans un contexte de récession glaciaire et de fonte, les écoulements sous-glaciaires ont pu jouer un rôle notable à la fois dans le processus d’ouverture et dans l’évolution morphologique des cavités. Les eaux de fonte sous-glaciaires, turbulentes et circulant à grande vitesse sous de fortes pressions, ont pu être un agent morphogène particulièrement efficace dans l’érosion d’un encaissant hétérogène, déformé et peu carbonaté.
Une fois les primo-formes ouvertes, l’eau de fusion sous-glaciaire, chargée ou non de matériaux (till, résidus conglomératiques) aurait exploité les plans et joints de stratification de la formation Cerro Toro.
Parmi les processus suggérés, la cavitation aurait été particulièrement morphogène, accompagnée de la dissolution préférentielle (corrosion) des faciès les plus carbonatés (gréseux). Ces derniers, les plus sensibles à l’ouverture, auraient conditionné la création de zones préférentielles d’érosion, en système noyé et/ou vadose.
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Jurij Kunaver : Origine et distribution des arêtes de pente (skedenj), des chaudrons à neige (kotlich) et des puits à neige, versant sud-est du massif du Kanin (Slovénie), 43-52
Résumé
Le massif du Kanin, en Slovénie, est un karst haut-alpin remarquable, à la frontière italienne. Outre ses grands gouffres, il recèle des paysages glaciokarstiques spectaculaires. L’utilisation d’images verticales acquises par drone, combinées aux investigations de terrain, a permis de reconsidérer des aspects des modelés glacio-karstiques. Deux zones au pied du haut plateau glacio-karstique du Kaninski podi ont été choisies pour une recherche détaillée. Les langues glaciaires s’écoulant depuis le plateau, en accélérant le long des fortes pentes, ont façonné des modelés glaciaires (roches moutonnées, chenaux sous-glaciaires) à peine retouchées par la karstification postglaciaire. Dans les zones plus précocement déglacées, les lapiaz se sont développés, notamment les Kluftkarren évoluant par démantèlement progressif des strates rabotées par les glaciers puis par constitution de nouveaux lapiaz à partir du joint de strate sous-jacent. Les images drone révèlent que les puits à neige
sont plus nombreux que les chaudrons à neige, les kotlich, ceux-ci dérivant en partie du recoupement d’anciens puits par le rabotage glaciaire. Enfin, les skedenj, grandioses arêtes de pente, résultent d’un rabotage latéral par les langues glaciaires.
Ils préservent sur leur crête des lambeaux de surfaces probablement antéglaciaires.
Ces modelés peu étudiés sont finalement présents sur de nombreux massifs alpins et méritent une étude approfondie.
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Alain Devos, Gilles Fronteau, Nicolas Bollot, Vincent Barbin, Ségolène Duchêne, Laurent Chalumeau : Un paléokarst « supra-pergélisol » dans les calcaires lutétiens (Soissonnais, France), 53-58
Résumé
Les calcaires lutétiens du Bassin parisien sont peu karstifiés comparés aux autres formations calcaires de l’est de la France. L’absence d’exokarst et de comportement hydrodynamique karstique des émergences, ainsi que les rares réseaux endokarstiques connus militent en faveur d’un aquifère reconnu comme fissural, perché et à faible énergie (drainance vers les sables sous-jacents) et peu capacitif.
Cela peut s’expliquer par la présence d’une couverture géologique marno-calcaire (Marnes et caillasses du Lutétien supérieur) peu favorable au ruissellement, fournissant des eaux peu agressives, et les dynamiques géomorphologiques de détente liée à l’incision des vallées (cambrure de versant, extension latérale). Pourtant, de nombreuses carrières souterraines du Soissonnais (« creutes ») recoupent un paléokarst représenté par des conduits calés sur fractures et caractérisés par un remplissage argilo-sableux remarquablement rythmé rappelant les varves glaciaires couples de lamines de 1,9 mm d’épaisseur moyenne).
L’étude sédimentologique (morphoscopie des quartz, granulométrie, calcimétrie, colorimétrie, matière organique) et une datation de ces rythmites (14C) dans une creute du Soissonnais à Acy (Aisne) montrent que ces remplissages s’inscrivent dans des conditions hydrodynamiques très calmes en régime noyé à épinoyé, et sont issus du démantèlement fluviatile de la couverture sableuse du Bartonien et des loess lors du dernier maximum glaciaire (stade isotopique 2). Ces observations témoignent d’écoulements karstiques en zone active, perchés au-dessus du permafrost régressif dans les vallées, et qui exploite d’abord la fantômisation initiale bien plus ancienne et ensuite une karstification préalable.
Elles permettent de proposer de nouvelles hypothèses morphogénétiques sur la karstification des bas plateaux de l’est du Bassin parisien généralement associée à l’incision des vallées et au recul de couverture.
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Thibaud Damien, Guillaume Pierre, Alain Devos, Olivier Lejeune, Boris Javaux : Typologie des karsts de la côte d’Île-de-France entre Sézanne et Reims, 59-64
Résumé
L’est du Bassin parisien est caractérisé par de nombreuses formations calcaires qui sont pour la plupart karstifiées – primokarsts (fantômisation), paléokarsts, karsts sous couverture géologique ou alluviale et karsts de contact lithostratigraphique.
Ces karsts s’inscrivent généralement en position de revers de côte et bénéficient de potentialités spatiales importantes conditionnées par le recul de couverture. À l’inverse, le long de la côte d’Ile-de-France, calée sur le contact Crétacé/Tertiaire, la karstification, à la fois
discontinue et très diversifiée, se cantonne essentiellement au front de côte. Sur un transect d’une soixantaine de kilomètres, du nord de Reims à Sézanne, les conditions de cette karstification affectant différentes formations géologiques d’âges éocène, paléocène ou crétacé sont analysées.
L’objectif est d’inscrire ces secteurs karstifiés dans un contexte morphostructural largement influencé par les paléogéographies du Paléogène
soulignées par des conditions de dépôt variées (continentales, littorales ou marines) à l’origine de faciès tantôt détritiques, tantôt carbonatés. Cette diversité de faciès détermine la morphologie actuelle et contrôle les potentialités de la karstification, qui s’opère durant le Pléistocène en fonction d’un gradient hydraulique croissant lié à l’incision des vallées orthoclinales ou des percées cataclinales. En termes de ressources en eau, des transferts entre bassins versants, assistés par le karst (captures actives), profitent aux cours d’eau anaclinaux du
front de côte.
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