publications.ffspeleo.fr [Bulletins]

Le plus grand poljé des Pyrénées, la source intermittente peut-être la plus connue, des explorations spéléologiques récentes qui en renouvellent la connaissance, et pourtant le plateau de Sault, aux confins de l’Aude et de l’Ariège, restait sous-étudié. Le programme de recherches conduit autour des équipes du BRGM entre 2014 et 2018 a permis de mener des études complètes sur de nombreux aspects et de mieux comprendre les fonctionnements souvent complexes de ce massif. Les objectifs et les méthodes de ce programme de recherche sont ici présentés.
Cacher ce résumé

Le plateau de Sault ou pays de Sault est l’un des principaux domaines karstiques de moyenne montagne des Pyrénées. Il occupe essentiellement la Zone nord-pyrénéenne plissée et localement la Zone interne métamorphique, plus ponctuellement au S les carbonates dévoniens de la Zone axiale. Cet ensemble karstique s’organise autour du plateau (ou surface) d’Espezel, situé vers 800-900 m ; c’est un paléopoljé, très localement encore fonctionnel et le plus vaste des Pyrénées. Il occupe une position originale sur la limite des bassins-versants méditerranéen et atlantique, et sur ses marges le poljé est défoncé par les canyons de l’Hers, de l’Aude et de son affluent le Rébenty. L’évolution géomorphologique de ce domaine est contrôlée par le soulèvement néotectonique des Pyrénées depuis 10 Ma ; elle peut être reconstituée en exploitant quatre marqueurs : (i) la séquence régionale des formes d’aplanissement étagées, sous lesquelles s’inscrit le poljé, qui en constitue la génération la plus récente attribuable à la fin du Néogène et immédiatement antérieure à l’incision des vallées actuelles ; (ii) un système complexe de vallées mortes évasées, associées au poljé ou plus anciennes, qui témoignent d’une réorganisation progressive du drainage au profit du bassin méditerranéen ; (iii) les sédiments alluviaux corrélatifs qui jalonnent le plancher du poljé et ses prolongements à l’échelle régionale, avec les premiers éléments de datation précise de ces dépôts ; (iv) les formes endokarstiques, notamment les niveaux de grottes et systèmes de réseaux étagés qui sont associés aux étapes de l’incision, celles qui précèdent la formation du poljé, sous les aplanissements culminants, comme celles qui ponctuent son défonçage par les canyons, pour l’essentiel pendant le Pléistocène.
Cacher ce résumé

Mieux contraindre les géométries géologiques en trois dimensions permet d’améliorer la modélisation et les simulations hydrogéologiques ultérieures. Ainsi, un modèle géologique 3D a été construit, comme préalable aux études hydrologiques, avec le logiciel 3D GeoModeller [©BRGM-Intrepid Geophysics], unique dans l’interpolation d’une géologie complexe à l’aide d’une méthode de champ potentiel. La construction de ce modèlegéologique 3D a trois objectifs principaux : améliorer la connaissance de la géologie régionale, proposer des géométries pour les barres urgoniennes calcaires et définir des connexions potentielles entre les différents aquifères. Les structures et les lithologies ont été cartographiées à une échelle appropriée. En profondeur, elles ont été contraintes par des études géophysiques. Les données gravimétriques nouvellement acquises ont été comparées au calcul direct de la réponse gravimétrique du modèle géologique 3D afin de mieux évaluer les zones d’inadéquation. Ainsi, la modélisation géologique 3D, outil intégrateur multi-données, s’avère être une approche indispensable pour contraindre les géométries des aquifères et des aquitards, étape fondamentale pour une gestion pérenne de l’eau.
Cacher ce résumé

L’étude hydrogéologique du plateau de Sault conduite par le BRGM entre 2014 et 2017 a permis dans un premier temps de construire un modèle géologique 3D à l’aide du logiciel 3DGeomodeller 2013 © BRGM – Intrepid Geophysics. Ce modèle, décrit par Allanic et al. [2023] est utilisé pour proposer un modèle hydrogéologique conceptuel à l’aide de l’approche KARSYS. Cette approche permet de reproduire l’extension des zones noyées des deux principaux systèmes karstiques drainant le plateau de Sault, à savoir les systèmes de Fontestorbes et de Fontmaure. Les résultats permettent de décrire l’organisation du drainage karstique en basses eaux et de discuter de la réorganisation de ce drainage en hautes eaux, en lien avec les résultats de traçages artificiels. Ces informations permettent également de proposer les sites où la disponibilité de la ressource en eau karstique est la plus favorable à l’implantation d’éventuels forages d’exploitation. La méthode permet également de reporter ces résultats en surface pour proposer les limites des bassins d’alimentation de ces systèmes karstiques, à la fois sur les terrains karstiques (autogéniques) et non-karstiques (allogéniques). Ce cas d’étude met en évidence l’intérêt de disposer d’un modèle géologique 3D pour étudier la structure et le fonctionnement des systèmes karstiques. Une dernière partie est dédiée à l’application d’une méthode de modélisation pseudo-génétique de drains karstiques s’appuyant sur ce modèle hydrogéologique dans le but de mieux comprendre l’organisation du drainage karstique en amont de la source de Fontestorbes.
Cacher ce résumé

La connaissance spéléologique du plateau de Sault était encore récemment très fragmentaire et bien inférieure à son potentiel de grand karst pyrénéen. Depuis quelques années, le Spéléo- Club de l’Aude a réorienté ses recherches dans certains secteurs- clés, dont la reculée de la source du Blau, un des trois principaux exutoires du massif. Des travaux lourds, basés sur un diagnostic théorique, ont abouti à une série de découvertes décisives depuis le versant de l’escarpement nord-pyrénéen et depuis la surface du plateau. Près de 10 km de nouveaux conduits ont été explorés et étudiés, en particulier dans le réseau Vieux Lion-Chandelier. Ils apportent de nombreuses informations inédites, mettant en lumière une phase majeure de karstification du massif ayant enregistré plusieurs cycles climatiques, un seuil hydrogéologique interne toujours actif en relation avec la faille de Picaussel, et un système fossile dont l’originalité pourra faire évoluer le calage chronologique controversé de la surface d’érosion principale du plateau de Sault.
Cacher ce résumé