Richard Maire : Point de vue sur l’évolution récente de la spéléologie : conséquences sur l’exploration et la recherche scientifique, 1-12
Résumé
Depuis 20 ans la spéléologie mondiale a fait des progrès immenses. En 1975, seuls 3 gouffres situés en France (Berger, Pierre Saint-Martin, Jean-Bernard) dépassaient 1 000 m de profondeur. En 1980, on en comptait 11 et début 1995, une cinquantaine ! Ce "boom" des explorations est lié à un ensemble de facteurs : facilités de déplacement, développement des expéditions à l'étranger, techniques de désobstruction, développement de la plongée, publication des résultats, étude des topographies. Le point de départ correspond à la mise au point en France des techniques alpines (progression sur corde simple) et leur application dans des cavités profondes et difficiles dès la fin des années 60 (Vercors, Chartreuse, Pyrénées) provoquant une révolution dans les mentalités. Sur le plan scientifique, cette évolution accélérée des explorations spéléologiques a beaucoup apporté. Grâce aux topographies des cavités et à l'addition progressive de nouveaux passages, on voit les réseaux souterrains s'agrandir. Ces données irremplaçables constituent un moyen objectif pour comprendre l'organisation des systèmes karstiques, même si certains s'emploient à dire que les réseaux souterrains explorés ne représentent qu'une faible partie de la réalité. De plus en plus, on remarque que les réseaux alpins sont souvent assez vieux, certains étant sans doute antérieurs aux glaciations quaternaires. Dans les karsts tropicaux, les recherches ont également fait des progrès importants, notamment dans trois pays pilotes : le Mexique (avec sept -1 000), la Papouasie Nouvelle-Guinée (avec ses puits et torrents souterrains sous la jungle équatoria-le, et son 1er -1 000), et surtout la Chine avec ses karsts et ses grottes-tunnels légendaires. Enfin, c'est la plongée souterraine qui aujourd'hui fait des progrès spectaculaires. En plus des siphons très longs explorés au cours des années 80, la plongée aux mélanges a permis d'atteindre des profondeurs étonnantes (
Sheck EXLEY) : -262 m à Bushmangat (Afrique du Sud) et -267 m dans la source vauclusienne du Rio Mante (Mexique) sondée jusqu'à -329 m ! Il faut rendre hommage au courage et à la grande technicité des plongeurs qui ont fait faire un bond remarquable dans la recherche spéléologique. En spéléologie alpine, la prochaine révolution technique qui s'amorce déjà viendra entre autres d'un allégement conséquent
du matériel.
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Bernard Loiseleur : Le massif du Seuil (Chartreuse, France) : organisation des réseaux souterrains, 13-28
Résumé
Le massif du Seuil (= 13 km²) se trouve sur le synclinal oriental de Chartreuse. Au nord et au sud de ce synclinal, on trouve plusieurs des plus importants réseaux souterrains français. Les deux principales cavités du Seuil, non reliées entre elles, sont la grotte du Mort Rû (~ 7 km) et le réseau du Guiers Vif (~ 15 km de développement), connecté avec le Trou des Flammes. Dans ces dernières années, la connaissance de ces systèmes a beaucoup progressé et plusieurs jonctions avec le plateau ont été réalisées (Masques-Mort Rû, Tasurinchi-Guiers Vif, Trou des Flammes-Guiers Vif). Mais la rivière de Malissard, la branche principale du réseau du Guiers Vif est située sous les Lances de Malissard, sur la bordure ouest du massif. Une telle situation s'explique par la disposition excentrée de l'axe synclinal. L'espoir est de découvrir un réseau comparable à ceux de la Dent de Crolles et de l'Alpe. Le collecteur principal semble devoir se situer dans l'axe du massif, sur la faille du GR9. Dans les années à venir, la comparaison de l'évolution des divers systèmes de Chartreuse montre que cet espoir est raisonnable.
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Yves Quinif : Le puits de Flenu (Belgique) : la plus grande structure endokarstique au monde (1200 m) et la problématique des puits du Houiller, 29-36
Résumé
Dans le Hainaut, de grandes structures verticales cylindriques traversent les terrains carbonifères du Westphalien productif sur plusieurs centaines de mètres d'épaisseur : ce sont les crans ou puits du Houiller.
Elles renferment des roches appartenant à la couverture du Crétacé inférieur, notamment les formations wealdiennes. Ces puits colmatés résultent de phénomènes d'effondrement à partir d'un karst profond élaboré dans les calcaires dinantiens sous-jacents.
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Christian Mangan, Eric Gilli : Le prototype de Coaraze (Alpes-Maritimes) : exemple de création d’une réserve d’eau souterraine par obturation d’une source karstique, 37-40
Résumé
L'obturation d'une petite source karstique à l'aide d'une vanne, à Coaraze (Alpes-Maritimes) montre qu'il est possible de créer des réserves d'eau souterraines à faible coût.
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Philippe Gombert : Approche théorique simplifiée de la dissolution karstique, 41-51
Résumé
L'estimation de la vitesse d'érosion d'un système karstique est une donnée qui se heurte à la variabilité du débit et du chimisme des eaux, caractéristique majeure des systèmes aquifères karstiques. Les méthodes empiriques sont généralement entachées d'une forte incertitude liée à la méconnaissance de la superficie des bassins-versants hydrogéologiques, voire même du nombre total d'exutoires d'un massif karstique. Les formules théoriques donnant la vitesse de dissolution en fonction d'un seul paramètre climatique (la pluviosité) sont criticables. On montre que l'emploi d'un modèle mathématique de la dissolution, basé sur le calcul des précipitations efficaces et sur la connaissance de l'équilibre calco-carbonique, fournit des résultats comparables avec une marge d'erreur moindre.
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Jean-Noël Salomon : Le Chili : pays de karsts extrêmes, 52-56
Résumé
Bien que très étendu, le Chili n'apparaît pratiquement pas dans les chroniques spéléologiques et karstologiques. Cela tient à la nature géologique essentiellement métamorphique et volcanique du pays. Pourtant on y rencontre des phénomènes karstiques dans des affleurements de gypse et de halite et dans des calcaires. Ceci est d'autant plus intéressant sur le plan scientifique que le Chili s'étire en latitude depuis le climat aride du désert d'Atacama au nord (1 mm/an à Iquique) aux îles hyper-humides de Patagonie (> 4 000 mm/an).
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Yves Quinif : Bruno Bastin = In memoriam, 57
Résumé
Pour la xième fois, la grosse pelle se coince dans un passage plus resserré de la Grotte de la Vilaine Source. Un juron tue le bruit de métal. Il faudra que je preine cette damnée pelle à mon tour pour soulager Bruno. Elle est casse pied et pourtant nous en aurons bien besoin là-bas, dans la galerie du CEK, sur la coupe 1, pour dégager les sédiments. J'apostrophe Bruno :
- "Et tu es sûr que les argiles du milieu sont froides ?"
- "Ça ne fait pas de doute ; j'ai trouvé Selaginella Selaginoides."
- "Quoi?"
- "C'est une plante que tu ne trouves qu'au nord du cercle polaire. Elle indique qu'il y avait une toundra froide à ce moment là. Nom de dieu de pelle, elle est encore coincée!"
Voilà Bruno BASTIN, tel que je m'en souviendrai toujours. Une grand monsieur en géologie du Quaternaire, en particulier en paléo-palynologie, cette science qui étudie les grains de pollens fossiles, ces pollens qui lui permettaient de me décrire un paysage tel que j'aurais pu le trouver en sortant de la grotte il y a quelques dizaines de milliers d'années. C'était aussi un botaniste de première force, co-auteur d'une flore de la Belgique moderne qui fait autorité.
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